Le premier ministre français prend la parole ce mardi 1er octobre devant les députés pour une déclaration de politique générale très attendue. Dans l'hémicycle, plusieurs de ses alliés aimeraient déjà le voir échouer.
Ils sont officiellement ses alliés. C’est sur eux que Michel Barnier compte pour «tenir», comme il le répète dans les médias français depuis sa nomination par Emmanuel Macron, le 5 septembre, au poste de Premier ministre. Qui sont-ils? Les ténors des différentes composantes de sa «base parlementaire», ce mot bizarre désormais utilisé en France pour désigner les quelque 230 députés (sur 577, loin de la majorité absolue) qui soutiennent le gouvernement entré en fonction le 21 septembre. Leurs noms? Gabriel Attal, Gérald Darmanin, Laurent Wauquiez ou François Bayrou (patron du Modem centriste, même s’il n’est pas élu à l’Assemblée)…
Tous ces hommes forts de la politique française seront aux aguets, ce mardi 1er octobre, devant le Premier ministre attendu à l’Assemblée nationale et au Sénat (son discours y sera lu en simultané par le ministre de la Justice, Didier Migaud, seul membre du gouvernement issu de la gauche) pour sa déclaration de politique générale. Le principe de cette prise de parole? Présenter sa vision aux députés pour les mois, voire les années à venir. Sauf que dans les faits, personne ne s’attend à des projets à long terme. Le second mandat présidentiel d’Emmanuel Macron s’achève en mai 2027. Le chef de l’État ne peut pas se représenter. Et d’ici là, tous ceux qui aspirent à lui succéder à l’Élysée redoutent que ce Premier ministre septuagénaire, rodé aux négociations, s’impose au poste qu’ils convoitent.
Tous sont donc des faux alliés. Dont le comportement, dans les prochains mois, va à la fois dépendre de leur âge (Gabriel Attal, premier ministre sortant, n’a que 35 ans), des sondages et aussi des décisions d’Emmanuel Macron. Lequel pourra de nouveau, à partir de juillet 2025, dissoudre s’il le souhaite l’Assemblée nationale.
Faux alliés numéro un? Les «caïds» du camp macroniste, qui sont toujours faiseurs de rois car leur coalition représente environ 150 députés. Gabriel Attal a mal supporté de se voir éjecter de l’Hôtel Matignon par une dissolution décidée sans son aval, et il proclame avoir «une histoire à écrire avec les Français».
Gérald Darmanin, l’un des premiers ralliés de droite à Macron en 2017, ministre de l’Intérieur sortant, rêve d’une candidature présidentielle et cultive pour cela son image de conservateur social, défenseur des artisans et des entreprises pour lesquels il refuse une hausse d’impôts, malgré la dérive des finances du pays. François Bayrou, vieux crocodile centriste de 73 ans (comme Barnier), ne peut pas s’empêcher de se voir comme un recours national…
Faux alliés numéro deux? La droite traditionnelle dont le chef à l’Assemblée, l’ex-président de la région Rhône-Alpes Laurent Wauquiez, a jalonné sa carrière politique de traîtrises. Cette droite battue aux législatives (elle a perdu près de 15 députés), se retrouve aux commandes d’un gouvernement avec une obsession: arrêter l’hémorragie de ses électeurs qui partent vers le Rassemblement national de Marine Le Pen. C’est pour cela que Michel Barnier, gaulliste de toujours, resté fidèle au parti «Les Républicains», a nommé Bruno Retailleau ministre de l’Intérieur. Retailleau a tout de suite promis de l’ordre. Il veut durcir la politique envers les migrants, pour augmenter les expulsions. Il vient de tenir des propos polémiques sur le respect de l’État de droit. Moralité: cette droite-là a les urnes dans son viseur. Elle sait que le refrain national-populiste est aujourd’hui de plus en plus prisé par ses électeurs.
Faux allié numéro trois? Emmanuel Macron lui-même. Le président de la République a réussi, grâce à Michel Barnier, à sortir de l’impasse dans laquelle il s’est mis avec sa décision surprise de dissoudre l’Assemblée nationale au soir des élections européennes le 9 juin. Hier, le camp présidentiel disposait d’environ 250 députés. Aujourd’hui, il en a perdu une centaine. Barnier est donc l’ultime sauveur de ce qui reste de la Macronie. Mais le Premier ministre, montagnard savoyard, est un dur à cuire. Et Macron est un impatient chronique. Résultat: les deux hommes se sont installés ces derniers jours dans une cohabitation qui ne dit pas son nom. Les comptes rendus du conseil des ministres n’auront plus lieu à l’Élysée où ils se tiennent, présidés par le Chef de l’État.
Chacun s’observe. Mais Macron peut-il supporter qu’un autre que lui prenne la lumière, voire lui vole la vedette et la fin de sa présidence?
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