ESCROQUERIE PAR MéTIER ET BLANCHIMENT AGGRAVé: LE MINISTèRE PUBLIC REQUIERT DE LOURDES PEINES DANS LE PROCèS 1MDB

Dans le procès 1MDB, la procureure fédérale Alice de Chambrier a requis 10 ans contre le patron de Petrosaudi et 9 ans contre son bras droit. Elle a demandé leur placement en détention pour motif de sécurité en raison du risque de fuite.

Le patron de Petrosaudi et son associé sont accusés d'escroquerie par métier et blanchiment aggravé, principalement.

Durant plusieurs mois jusqu'au jugement, les deux prévenus seront placés devant la perspective d'une lourde condamnation et pourraient être tentés de quitter la Suisse. Double nationaux, ils disposent de passeports suisse et saoudien pour le patron de Petrosaudi, suisse et britannique pour son adjoint.

Subsidiairement à la détention, la Cour des affaires pénales pourrait prendre des mesures de substitution garantissant la présence en Suisse des intéressés. La procureure a requis également que les valeurs séquestrées par la Suisse soient confisquées et restituées à 1MDB, le fonds souverain malaisien lésé.

En outre une créance compensatrice dépassant les 2 milliards de dollars, correspondant aux sommes qui ont échappé aux séquestres a été réclamée. Un montant qui devrait être aussi rendu aux Malaisiens.

Affaire «hors normes»

Comme les parties civiles, la représentante du Parquet a insisté sur le caractère «hors normes» de l'affaire. La somme dérobée à 1MDB ne se calcule pas en dizaines ou en centaines de millions de dollars, elle atteint 1,83 milliard, soit 1% du produit national brut de la Malaisie. Et cet Etat s'est endetté pour doter ce fonds souverain, qui devait financer son développement.

Alice de Chambrier a décrit les auteurs de cette «arnaque du siècle» comme des personnes «bien sous tous les rapports», en apparence. Et en réalité, «calculatrices, manipulatrices et d'une cupidité obscène». Des personnes qui ont dilapidé leur butin en locations de jet privé ou de yacht, en achats d'immeubles à Londres et à Genève, en pierres précieuses.

L'accusatrice a énuméré les titres dont se parait le patron de Petrosaudi pour suggérer que sa société était soutenue par l'Arabie saoudite: cheik, prince, conseiller du roi, cousin du prince Turki.

Sanction maximale

Chacune des trois opérations de soustraction de fonds qui se sont succédées mériterait la sanction maximale. La représentante du Ministère public de la Confédération (MPC) a souligné «l'activité et la ténacité criminelles hors normes» des prévenus. Ils ont agi sur une dizaine d'années, de 2009 à 2019, si l'on retient les actes de dissimulation.

La procureure Muriel Jarp a relayé sa collègue pour décortiquer par le menu les opérations financières mises en oeuvre afin de siphonner le fonds souverain. Ce plan «sophistiqué et parfaitement orchestré par de nombreux intervenants» visait à convaincre le conseil d'administration de 1MDB qu'il procédait à des investissements cautionnés par le royaume saoudien.

Un plan qui ne reposait sur rien puisque, au moment de conclure avec les Malaisiens, Petrosaudi n'avait pas d'activité réelle, rapportant des revenus. Cela ne l'a pas empêché de se prévaloir de droits sur des champs pétroliers au Turkmenistan. C'est en faisant miroiter ces droits auprès du conseil d'administration du fonds que les deux accusés sont parvenus à conclure une joint-venture.

Soustraction de valeurs

Pour justifier les peines requises, Alice de Chambrier a évoqué les montages financiers complexes, le recours à des hommes de paille, les fausses explications. Lorsque l'enquête a démarré en Suisse, les accusés ont multiplié les transferts à l'étranger afin de mettre à l'abri un maximum de valeurs.

Selon l'accusation, les deux prévenus n'ont pas pris conscience de la gravité de leurs actes. Ils ont fait preuve «d'une attitude quérulente», réclamant par trois fois la récusation du procureur en charge. Ces circonstances personnelles défavorables excluent toute réduction de peine, pour la procureure.

Me Lezgin Polater, qui défend les intérêts de 1MDB, a évoqué des «méthodes dignes du crime organisé»: surnoms, codes, sociétés-écrans, multiplication des mouvements de fonds. L'avocat a relevé aussi les trous de mémoire des accusés, leur tendance à faire porter le chapeau aux Malaisiens, à suggérer qu'ils obéissaient à des ordres venus «d'en haut» ou à se réfugier derrière des secrets d'Etat.

Le procès se poursuit jeudi avec les plaidoiries de la défense.

(ATS)

2024-04-17T16:04:22Z dg43tfdfdgfd