LA FRANCE DANS L'INCERTITUDE ABSOLUE AU DERNIER JOUR DE CAMPAGNE

Le pays boucle vendredi une campagne sous très haute tension. Dimanche, il basculera à l’extrême droite, ou il s’enfoncera dans une instabilité politique inédite.

La France pourrait s’endormir dimanche sans la moindre idée de qui le gouvernerait, à un mois des Jeux olympiques de Paris. Depuis la décision surprise d'Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée, la recomposition politique express du pays a confirmé la montée en puissance du Rassemblement national (RN), qui espère accéder au pouvoir la semaine prochaine.

La crainte d’un gouvernement dirigé par l’extrême droite a toutefois conduit à la formation, dans la douleur, d’un nouveau «front républicain» avec le désistement de quelque 200 candidats pour contrer les représentants du RN au second tour. Marine Le Pen y voit la mise en place d’un «parti unique» réunissant «ceux qui veulent conserver le pouvoir contre la volonté du peuple».

«Non, dans ces conditions, c’est pas possible»

Parmi les inconnues du scrutin figure le nombre d’abstentionnistes. «Certains vont se dire: «Non, dans ces conditions, c’est pas possible», explique Janine Mossuz-Lavau, directrice de recherche émérite au Centre de recherche politique de Sciences Po (Cevipof). Selon un sondage Ifop paru jeudi, le RN et ses alliés obtiendraient entre 210 et 240 sièges, loin de la majorité absolue (289). L’alliance du Nouveau front populaire arriverait en seconde position, devant le camp macroniste et la droite républicaine, mais sans majorité claire.

«Soit le RN obtient une majorité absolue et je peux, dès dimanche engager le projet de redressement que je porte (...). Ou alors le pays est bloqué», a asséné jeudi soir le président du parti Jordan Bardella, 28 ans, qui aspire à devenir Premier ministre. Les nombreux appels à faire barrage à l'extrême droite seront-ils suivis ? Louise, 23 ans, refuse de choisir entre le parti centriste Horizons et le RN, après avoir voté Lutte ouvrière (extrême gauche) au premier tour.

Une cinquantaine d'agressions

Elle a «beaucoup regretté» son vote barrage en faveur d’Emmanuel Macron face à Marine Le Pen à la présidentielle en 2022. «Je ne sais pas si je connais quelqu’un qui voterait pour la majorité», avoue-t-elle. Cette fracture fondamentale a donné lieu à une campagne violente, avec agressions physiques de militants, menaces verbales, règlements de comptes politiques et libération de la parole raciste. «51 candidats, suppléants ou militants» ont été «agressés physiquement» ces derniers jours, selon le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin.

Malgré sa longue stratégie de normalisation, le RN a été rattrapé par des dérapages racistes et antisémites de plusieurs de ses candidats, que le parti a tenté de minimiser en parlant de quelques «brebis galeuses» ou de «maladresses». «Quand c’est un candidat sur trois (...), ce n’est pas quelques brebis galeuses, c’est tout le troupeau qui est malade», a raillé Gabriel Attal, Premier ministre sortant.

Signe du climat tendu, le gouvernement a annoncé que «30'000 policiers et gendarmes dont 5000 à Paris et sa banlieue» seraient mobilisés dimanche pour la soirée du second tour.

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