LA GAUCHE ET LA DROITE SE DéCHIRENT: LA PRESCRIPTION POUR LES MEURTRES DIVISE LA POLITIQUE SUISSE

Actuellement, le meurtre est un crime prescrit au bout de 30 ans. Mais au Conseil des Etats, on réfléchit à abroger cette loi. Si la gauche s'oppose à un changement, l'UDC veut en revanche aller encore plus loin.

Été 1982: Brigitte Meier, 17 ans, et Karin Gattiker, 15 ans, partent pour un tour à vélo à travers la Suisse orientale. Mais elles ne sont jamais revenues. Le 31 juillet, elles ont disparu sans laisser de traces. Neuf semaines plus tard, elles sont retrouvées mortes dans une grotte à Kobelwald (SG). Jusqu'à aujourd'hui, l'affaire n'a pas été résolue. La police a mis fin à l'enquête, seule une communauté d'intéressés continue à enquêter de son côté.

Les chances de succès sont minces. La police a détruit les preuves – car les meurtres sont prescrits au bout de 30 ans. A la demande du canton de Saint-Gall, les politiciens juridiques du Conseil des Etats veulent maintenant changer la donne. Les partis et les cantons ont pu s'exprimer à ce sujet jusqu'à mardi.

Pour la gauche, la prescription doit rester

Le camp de la gauche et des Vert-e-s n'est pas favorable à cette révision. Ils souhaitent que les assassinats continuent à être prescrits au bout de 30 ans. La prescription sert à «préserver la paix sociale» et favorise le processus de deuil des proches, écrivent les Vert-e-s dans leur réponse à la consultation.

Le PS argumente également contre le projet. Les preuves pourraient s'amenuiser au fil du temps et augmenter ainsi le risque d'erreur. De plus, les enquêtes menées après une si longue période pourraient concerner plusieurs personnes et les affecter psychologiquement.

Pour la droite, le meurtre doit être plus sévèrement puni

De l'autre côté de l'échiquier politique, le ton est tout autre. Les meurtres devraient être imprescriptibles, même s'ils ont été commis par des mineurs, demande l'UDC dans sa réponse à la consultation. Une telle extension n'est pas prévue dans le projet. Aujourd'hui, seules les infractions telles que le génocide et les crimes contre l'humanité sont imprescriptibles, même lorsque les auteurs sont mineurs.

Le PLR soutient le projet et fait référence aux progrès technologiques qui permettent de mener des enquêtes même après une longue période. Par exemple avec les analyses ADN, qui sont autorisées en Suisse depuis août de l'année dernière. Elles ont récemment permis à la police de Dortmund, en Allemagne, de faire une percée. Une arrestation a eu lieu 33 ans après un meurtre, grâce à des traces d'ADN sur un ruban adhésif.

Point de discorde entre les cantons

Les cantons ont également des avis divergents. Alors que le canton de Berne soutient le projet et demande en outre que l'on examine les délais de prescription de tous les crimes graves, le canton d'Argovie met en garde: l'imprescriptibilité susciterait de faux espoirs qu'un cas puisse être élucidé après une longue période sans succès. Et Bâle-Campagne de faire remarquer que le besoin de condamnation diminue avec le temps.

A Saint-Gall, on voit les choses différemment. Aujourd'hui encore, certaines femmes dans les villages craignent que le coupable du double meurtre de 1982 soit encore parmi elles, a déclaré l'analyste de cas allemand Axel Petermann à la «NZZ». Il avait enquêté sur l'affaire et écrit un livre à ce sujet. Une modification de la loi ne serait certes plus utile dans le cas de la grotte – les cas déjà prescrits ne seraient pas rouverts rétroactivement. Néanmoins, de nombreux riverains aimeraient avoir une certitude définitive. 

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