MOSCOU A ENVOYé 10 000 MIGRANTS «CREUSER DES TRANCHéES» EN UKRAINE

Le Kremlin oblige les étrangers fraîchement naturalisés à s'enregistrer auprès de l'armée. Un mécanisme juridique «pas clair» qui a permis d'envoyer 10 000 migrants en Ukraine, alors que les autorités se montrent de plus en plus hostiles vis-à-vis des immigrés.

Bien que les chiffres changent en fonction des estimations, le fait que la Russie ait subi de très importantes pertes humaines en Ukraine n'est pas un secret. Au fur et à mesure que ce bilan s'alourdit, le Kremlin est confronté à un problème croissant: remplacer ses morts. Surtout au vu du fait que, d'après plusieurs analystes occidentaux, Vladimir Poutine mise actuellement sur une guerre d'usure, dans laquelle ses forces sont censées «poursuivre progressivement et indéfiniment».

Il faut de la masse humaine, donc, et les options font défaut. Comme le rappelle Bloomberg, les autorités russes souhaitent éviter une deuxième vague de mobilisation, une mesure impopulaire qui avait fait fuir de nombreux citoyens craignant être envoyés en Ukraine.

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Afin de minimiser la participation des Russes aux combats, le Kremlin a envisagé plusieurs solutions, écrit le think tank polonais «Centre for Eastern Studies» (OSW). L'une d'entre elles prévoit la conscription d'étrangers dans l'armée, ajoute-t-il.

Migrants naturalisés visés

Cette mesure touche notamment les immigrés, ceux ayant été naturalisés en particulier, et n'est pas toujours volontaire. Ce sont les mêmes autorités russes qui l'ont affirmé, ce jeudi soir. «Nous avons attrapé plus de 30 000 personnes qui ont reçu la citoyenneté russe, mais n'ont pas voulu s'enregistrer auprès de l'armée», a affirmé Aleksandr Bastrykine, président du Comité d'enquête russe, lors d'un forum juridique à Saint-Pétersbourg. Et d'ajouter:

«Environ 10 000 d'entre eux ont été envoyés dans la zone de l'opération militaire spéciale»

- Aleksandr Bastrykine -

«Pourquoi a-t-on besoin de ces migrants là-bas? Pour creuser des tranchées et construire des fortifications», a-t-il ajouté. «Nous avons besoin de bonnes mains pour cela. Ils rejoignent maintenant les rangs de nos unités de l'arrière.»

Les forces russes ont bâti des centaines de kilomètres de tranchées et fortifications dans le régions occupées d'Ukraine. C'est notamment à cause de cette imposante ligne de défense que la vaste contre-offensive lancée par Kiev l'été dernier a échoué.

Discours anti-migrants

Aleksandr Bastrykine a affirmé que la Constitution exige que les citoyens russes naturalisés s'inscrivent au service militaire et participent, si nécessaire, à la guerre en Ukraine.

Le mécanisme juridique utilisé par le gouvernement russe pour recruter ces migrants fraîchement naturalisés «n'est pas clair», observe pourtant le centre de réflexion américain Institute for the Study of War (ISW). Il est «peu probable» qu'il fasse partie du système de conscription ou de mobilisation existant, ajoute-t-il.

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Les déclarations d'Aleksandr Bastrykine interviennent dans un contexte de plus en plus hostile vis-à-vis des migrants, qui sont présentés par les autorités comme étant «une menace pour la société russe», note l'ISW.

Avant d'évoquer les 30 000 étrangers «attrapés» par les autorités, le même Bastrykine a affirmé que la criminalité liée aux migrants se répand dans toute la Russie et s'intensifie. Près de 40 000 crimes ont été commis par des étrangers l'année dernière, a-t-il ajouté. Il s'agissait en grande partie de crimes «particulièrement graves» et «extrêmes».

Trois millions de migrants sont arrivés à Moscou et à Saint-Pétersbourg au cours des quatre premiers mois de 2024, a poursuivi Bastrykine, en appelant à des lois plus strictes pour limiter ces chiffres. A ses yeux, les mesures obligeant les étrangers naturalisés à rejoindre l'armée vont dans le même sens. Il s'agit d'une «ruse qui pousse les migrants à quitter lentement la Russie», a-t-il déclaré.

Les récents attentats islamistes, perpétrés à Moscou en mars et au Dagestan en juin, ont attisé ces sentiments anti-migrants, rapporte le Defense Post. La plupart des migrants en Russie proviennent d'anciennes républiques soviétiques d'Asie centrale, telles que le Tadjikistan, l'Ouzbékistan ou le Kirghizistan. (asi)

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