«NOUS ACCORDERONS PLUS D’IMPORTANCE AUX FUTURS TRAITéS AVEC L’UE, ESSENTIELS POUR DE NOMBREUSES PME»

Président de l’Union suisse des arts et métiers, le conseiller aux États tessinois Fabio Regazzi annonce que l‘USAM envisage davantage d’ouverture envers l’UE et offre de faire des compromis. De quoi alimenter les discussions au congrès bisannuel qui se tient à Berne mardi prochain, en présence du conseiller fédéral Albert Rösti. Chasseur, Fabio Regazzi milite en outre pour l’abattage de 90% des loups en Suisse.

Monsieur Regazzi, l’USAM va-t-elle maintenir son attitude provocante après le départ du directeur Hans-Ulrich Bigler?

Nous demeurerons fermes sur le fond. Je pars du principe que le nouveau directeur, Urs Furrer, qui arrive en mai, mettra ses propres priorités.

Un changement de cap en vue pour l’USAM?

Oui, même s’il y a encore des points critiques dans le dossier européen. À l’avenir, nous accorderons plus d’importance aux futurs traités avec l’UE, car ils sont essentiels pour de nombreuses PME.

C’est-à-dire?

On oublie trop souvent que, outre les grands groupes, quelque 40% des PME travaillent à l’export. Si nous laissons les anciens accords avec l’UE s’affaiblir au lieu de les renouveler, les exportations vers l’UE seront de plus en plus compliquées.

Beaucoup de gens critiquent la nouvelle démarche du gouvernement. L’USAM acceptera-t-elle le paquet d’accords que le Conseil fédéral négocie actuellement à Bruxelles?

Oui, je suis confiant. Je pense que les chances d’obtenir de nouveaux traités européens sont intactes. Reste qu’en fin de compte c’est le peuple qui décidera.

Toutefois, de nombreuses PME s’inquiètent de voir des entreprises étrangères pratiquer le dumping salarial en Suisse une fois les nouveaux accords européens signés. Vous niez la légitimité de ce souci?

Non. Si les salaires ne sont plus assez protégés en Suisse, il y a effectivement un risque de dumping salarial. Et nous voulons l’éviter à tout prix. Ainsi, l’USAM donnera son accord uniquement si la protection des salaires est garantie à 100%. Sinon, des entreprises de l’UE employant des travailleurs à bas prix supplanteront par exemple des cuisinistes ou des entreprises du bâtiment suisses.

Comment résoudre ce problème? La réglementation UE sur les frais désavantagerait gravement les entreprises locales. Il est peu probable que l’UE accorde à la Suisse un traitement de faveur en matière de notes de frais.

On verra bien. Je rappelle que la réglementation des frais est aussi très controversée parmi les États membres de l’UE. Néanmoins, nous sommes tout à fait prêts à envisager des compromis sur d’autres points, pour autant que la protection des salaires ne soit pas menacée: une réduction du délai d’annonce préalable par exemple, qui concerne les entreprises exécutant des commandes en Suisse, est tout à fait négociable. En effet, avec les moyens numériques modernes, il est possible de contrôler les entreprises de l’étranger dans un délai plus court.

La protection salariale est-elle vraiment le seul point que l’USAM critique encore dans les négociations en cours avec l’UE?

Il y a bien sûr d’autres points. Nous sommes ainsi mécontents que la Cour de justice européenne continue à jouer un rôle dans le règlement des litiges entre la Suisse et l’UE. Ce ne sera malheureusement pas possible de l’éviter entièrement. Nous devrons donc, dans une certaine mesure, chercher un terrain d’entente. Il faut en outre être certain que les citoyens de l’UE ne sapent pas, grâce aux nouveaux traités de l’UE, les assurances sociales chez nous. Cependant, nous n’avons plus d’objections de principe sur ces points des futurs accords.

Dans quelle mesure l’industrie dépend-elle de la main-d’œuvre qualifiée de l’Union européenne?

Je suis très inquiet à ce propos. Je pense que nous manquons certes de personnel qualifié, mais surtout de main-d’œuvre en général. Je le vis au sein de mon entreprise. Depuis des mois, nous cherchons un comptable. Vous n’imaginez pas à quel point c’est difficile. Heureusement, au Tessin, nous avons aussi la possibilité de chercher de l’autre côté de la frontière, en Italie.

Pourtant, au Tessin, le grand nombre de frontaliers irrite beaucoup de monde.

C’est vrai. Ces personnes ne veulent pas voir que, sans frontaliers, notre canton connaîtrait de grandes difficultés. Certains secteurs comme le bâtiment, les hôpitaux et les maisons de retraite pourraient fermer. Et je pense que les problèmes d’emploi deviendront dorénavant plus graves.

Le loup est un autre défi d’actualité. Vous êtes chasseur. Êtes-vous allé chasser le loup?

Au Tessin, jusqu’à maintenant, les gardes-chasses sont chargés de la régulation. Les chasseurs ne sont pas concernés. Si cela devait changer, je m’inscrirais.

Pourquoi?

Parce que la situation est devenue incontrôlable. En région de montagne, les loups causent désormais énormément de problèmes. Les mesures de protection que les agriculteurs sont contraints de prendre sont disproportionnées. La décision du conseiller fédéral Albert Rösti de tirer certains loups est un pas dans la bonne direction. Mais j’aurais été encore plus loin.

Jusqu’où? Albert Rösti a pourtant été vivement critiqué.

Il devait s’y attendre en tant que conseiller fédéral. Pour être provocateur: nous n’avons pas besoin de loups en Suisse. Je suis conscient que ce n’est pas réalisable. Mais 300 loups comme aujourd’hui, c’est, une fois pour toutes, bien trop. Vingt à 30 bêtes suffiraient. Il devrait être autorisé d’abattre tout le reste.

C’est fort extrémiste.

Non, nous avons besoin de plus nombreuses zones sans loups. Je suis clairement du côté des paysans de montagne sur la question. À mon avis, les agriculteurs contribuent plus à la biodiversité que les loups.

Comme président de l’Union suisse des arts et métiers, vous semblez être moins agressif que sur la question du loup. Pourquoi donc?

À mes yeux, la chasse est une affaire personnelle. À l’USAM, je ne peux pas être un partisan d’une ligne dure, car je dois tenir compte de la pluralité des opinions de nos membres.

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