UN PHOTOMONTAGE REVISITE «LA PêCHE MIRACULEUSE»

L’artiste genevois Jean Stern réinterprète le célèbre retable de Konrad Witz grâce à un photomontage. La réalisation est exposée sur la façade du temple durant les travaux.

Il s’est déployé comme un leporello sous l’horloge monumentale qui pare l’attique du temple de la Fusterie. Intitulé «Déplié», ce photomontage de 5 ​mètres sur 12 revisite dans un esprit contemporain un tableau majeur du patrimoine artistique genevois, «La pêche miraculeuse», qui inscrit un mélange d’épisodes évangéliques dans la rade de Genève et constitue la première représentation d’un paysage topographiquement exact dans la peinture européenne.

Commandée par la Fondation 1907 et l’Église protestante de Genève (EPG), propriétaire du monument, cette réalisation artistique a été conçue par Jean Stern, en collaboration avec Anouk Dunant Gonzenbach, auteure de «Un tableau mais pas que. La pêche miraculeuse de Konrad Witz» et le pasteur Jean-Michel Perret dans le cadre de «Sans le seuil», un ministère de l’EPG qui entend repenser le sacré, par le moyen d’événements décalés, dans des lieux publics porteurs de sens.

Baptême dans les eaux

Le plasticien genevois a découpé le retable exécuté en 1444 par Konrad Witz en quatre volets, avec lesquels il a fait alterner des scènes photographiques contemporaines se déroulant face aux mêmes monts sur la même rive des Pâquis – un baptême dans les eaux du Petit Lac en 2015, par exemple – ainsi qu’un fragment du «Lac Léman» de Ferdinand Hodler, datant de 1915.

«Il s’agit de la réactualisation d’une relecture de «La pêche miraculeuse» que j’avais réalisée aux Bains des Pâquis il y a neuf ans, explique Jean Stern, né en 1954 et longtemps professeur à la Haute École d’art et de design (HEAD). Je souhaitais conserver l’image du baptême, une pratique vieille de 2000 ans, qui apparaît ici sous un jour très actuel.»

Jouant l’anachronisme, «Déplié» associe donc plusieurs époques, toutefois liées par la continuité de la ligne des montagnes: le récit biblique du début de notre ère, le moment où Konrad Witz peint le tableau à la Renaissance, et les rives du Léman aujourd’hui. Il s’amuse également à faire dialoguer ces diverses temporalités à travers plusieurs échos formels.

Le sens de l’image

Alors que le Jésus du chef-d’œuvre marche sur l’eau, deux jeunes filles capturées par l’objectif de l’artiste genevois s’avancent pieds nus dans l’onde. Au pêcheur figuré par le pinceau dans les flots répond la photo du bain baptismal, et le panorama hodlérien converse idéalement avec celui de Witz, disant en filigrane l’immuabilité de l’intérêt esthétique de ces lieux aux yeux des peintres suisses à travers les âges.

«Accrocher ce projet dans l’espace public permet de rendre visible au plus grand nombre un tableau qu’il faut sinon aller contempler au Musée d’art et d’histoire, indique Jean Stern. Il offre aussi d’interroger le sens de l’image religieuse et patrimoniale dans la cité.»

Le photomontage sera visible jusqu’à la fin des travaux, prévue en principe pour 2027. En raison de cette longue durée d’exposition, une sérieuse réflexion a été menée pour trouver le support adéquat. Imprimé sur des adhésifs collés sur des panneaux de chantier en bois, il devrait résister aux intempéries.

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