AVEC LES CHOLITAS DE BOLIVIE QUI PRATIQUENT LE SKATEBOARD

À Cochabamba, capitale de la culture quechua en Bolivie, Celia D. Luna a repéré ces jeunes femmes qui pratiquent le skateboard, tout en arborant la tenue des paysannes andines. Le symbole d’une fierté retrouvée pour celles qui défient les préjugés racistes et revendiquent être des cholitas, terme qui désignait hier avec mépris les femmes d’ascendance indienne.

Au coeur des Andes, à 2 750 mètres d’altitude, un groupe de jeunes femmes s’adonne à la glisse en toute légèreté. Pourtant, au fil des rues ou sur les rampes de l’un des deux skateparks de Cochabamba, la troisième ville de Bolivie (630 000 habitants), les membres d’Imillaskate (imilla signifie «jeune fille» en quechua et en aymara) ne passent pas inaperçues.

Depuis 2019, elles pratiquent le skateboard, jusqu’alors quasi réservé aux garçons, en affichant l’apparence traditionnelle des femmes indigènes de l’Altiplano : des nattes, un chapeau, un petit corsage et surtout une pollera, jupe très colorée couvrant des jupons de dentelle. Une tenue improbable pour effectuer des acrobaties sur une planche à roulettes.

Casser l’image péjorative accolée aux cholitas

Mais un choix revendiqué avec fierté, pour casser l’image péjorative accolée aux cholitas comme on a longtemps appelé ici avec dédain les femmes d’origine indienne des régions andines. «Nos mères et nos grands-mères portaient la pollera et ont subi des discriminations, explique Brenda Tinta, 31 ans, psychologue pour enfants, l’une des fondatrices d’Imillaskate. Elles étaient méprisées, n’avaient pas accès aux études, ni aux emplois salariés. Nous avons voulu leur rendre leur dignité.»

Étudiantes, graphistes ou employées de bureau, âgées de 23 ans à 32 ans, Brenda, Deysi, Elinor et leurs amies font des démonstrations à l’occasion de fêtes locales et animent régulièrement des ateliers d’initiation auprès d’enfants défavorisés.

La photographe américanopéruvienne Celia D. Luna, qui est allée les saisir en action en 2022, en est encore épatée : «Elles font des émules en Bolivie et dans toute l’Amérique du Sud. Elles parviennent à faire évoluer les mentalités. Mieux : leur enthousiasme m’a poussée à me reconnecter à mes propres racines familiales, dans les Andes péruviennes.»

➤ Article paru dans le magazine GEO n°542, Parcs américains, d'avril 2024.

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