LA MINISTRE PLR EN COLèRE: ISABELLE MORET AURAIT «BOULEVERSé» UN CHAUFFEUR DE L'ÉTAT APRèS UNE QUERELLE

Blick a appris que la ministre PLR s'est fâchée avec l'un des chauffeurs mandatés par l'État de Vaud. Elle a demandé à vérifier tous les permis du conducteur, qui aurait été «bouleversé». Les services de l'élue nient le conflit et évoquent un contrôle de routine.

Une ministre fâchée a-t-elle le pouvoir de s’acharner sur un serviteur de l’État à cause d’une broutille? Manifestement, la réponse est «oui», en gras et en majuscule. Des informations obtenues par Blick attestent d’un conflit ubuesque entre la conseillère d’État libérale-radicale (PLR) Isabelle Moret et Rémy*, l’un des chauffeurs du gouvernement vaudois.

Pas anodine, cette étonnante affaire aurait «bouleversé» le conducteur, au service de l’Etat depuis près de vingt ans. Tant et si «bien» que l’homme a failli tout plaquer. Contacté, le chauffeur en question n’a pas souhaité confirmer ou commenter nos informations, mais de nombreuses sources indépendantes les unes des autres relatent avec les mêmes accents cette bisbille qui a pris, pour l’homme, des proportions absurdes.

«Engueulade» à cause de la radio

Tout aurait commencé courant 2023, lors d’une sortie en voiture. Rémy possède une société qui fournit des chauffeurs à l’État, appelés lors de trajets longue distance et en soirée. La cheffe du Département de l’économie, de l’innovation, de l’emploi et du patrimoine (DEIEP) est à bord d’un véhicule conduit par le chauffeur. Elle téléphone. La radio est trop forte à son goût et elle le fait savoir à Rémy, sèchement.

Ce dernier n’a pas apprécié, d’autant qu’il aurait écouté à ce moment-là une «Infotrafic». Les deux se seraient «engueulés», rapporte une source proche du gouvernement. L’évènement, désagréable, mais somme toute banal, aurait pu s’arrêter là.

Convoqué à la police du commerce

Or Isabelle Moret aurait demandé à faire vérifier tous les permis de Rémy, pourtant mandaté par l’État depuis près de deux décennies. Selon les informations de Blick, le chauffeur a été convoqué par la police du commerce, et cette soudaine nécessité de montrer patte blanche a «mis bien mal» l’homme qui prendra sa retraite fin 2024, après près de trente ans de métier.

Blick a contacté la chancellerie et le département dirigé par Isabelle Moret pour vérifier ces informations. La chancellerie, tout d’abord, puisque c’est elle qui gère les transports des conseillers d’État. Le chancelier, Michel Staffoni, indique simplement que Rémy est prestataire du canton de Vaud depuis 2005 et «a fait l’objet de toutes les vérifications nécessaires pour ce type d’activité».

Contrôles de routine?

Les réponses du DEIEP sont à peu de choses près un copié-collé de celles de la chancellerie. Mais le porte-parole, Pascal Chavent, ajoute deux éléments.

D’abord, qu’Isabelle Moret n’aurait aucun conflit personnel Rémy. Puis, il contextualise la vérification des permis du chauffeur. «À la suite de l’entrée en vigueur du règlement du 11 décembre 2019 sur le transport des personnes à titre professionnel, la police cantonale du commerce qui relève du DEIEP s’est assurée que l’entreprise [de Rémy], comme toutes autres entreprises de véhicules de transport avec chauffeur, respectait les conditions prévues dans le nouveau cadre légal, ce qui est le cas», écrit le porte-parole par e-mail.

Excuses de l’ancien chancelier

Mais le timing peut étonner. Isabelle Moret étant entrée en fonction le 1er juillet 2022, pourquoi vérifier, sept mois après l’entrée en vigueur du règlement, que les chauffeurs étaient aux normes? Notre demande de nous entretenir directement avec la ministre est restée lettre morte.

Certaines personnes qui connaissent l’affaire évoquent une «vengeance» à la suite de la dispute dans la voiture. Une idée étayée par les excuses qu’aurait présentées personnellement l’ancien chancelier, Aurélien Buffat, à Rémy. Le haut fonctionnaire a subitement quitté ses fonctions à l’automne dernier, après seulement 20 mois en poste.

Contacté par Blick, Aurélien Buffat indique être toujours soumis au secret de fonction, et ne souhaite pas commenter. Un autre individu haut placé tempère cette lecture: «Isabelle Moret a véritablement cru à une irrégularité. Elle a craint que la presse la découvre avant que les services responsables ne s’en chargent.»

Refus de rouler avec Rémy

Du côté de la cheffe du DEIEP, non seulement on nie le conflit, mais on assure aussi que Rémy et Isabelle Moret se côtoient. La conseillère d’État a roulé avec Rémy le 29 mai, nous dit-on, et continuera d’utiliser ses services si nécessaire, de même que ceux d’une autre entreprise, également mandatée si Rémy et ses collègues sont indisponibles, affirme le porte-parole.

Or, Blick a appris que durant une période comprise entre janvier et mars 2024, Isabelle Moret aurait refusé de monter en voiture avec Rémy, faisant appel à cette autre entreprise. Une histoire de toux et de masques Covid, que le chauffeur n’aurait pas jugé opportun de porter, serait à l’origine de ce nouvel épisode.

Froid et poli

La volonté de Madame Moret de ne pas rouler avec Rémy a-t-elle engendré des frais supplémentaires pour les contribuables? Le chancelier vaudois Michel Staffoni informe que cet autre transporteur a facturé 2584 francs à l’État, en 2024. Sans toutefois préciser quelle, ou quel ministre a été conduit par ce service. «Je n’ai pas accès à ces informations», répond le chancelier.

Impossible par ailleurs de comparer les prix pratiqués par Rémy et cette autre compagnie. Les deux entreprises n’utilisent pas les mêmes méthodes de facturation, explique le haut fonctionnaire.

La brouille se serait réglée depuis, d’elle-même. Lorsque Rémy et la conseillère d’État PLR se croisent, ils échangeraient désormais des «bonjour-au revoir» de circonstance.

*Nom connu de la rédaction

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